Noémie Nojaroff, cheffe de projet à la Tour du Valat, répond à nos questions concernant le déploiement de la méthode Natur’Adapt sur 13 sites en Provence-Alpes-Côte d’Azur, dont la Réserve naturelle régionale de la Tour du Valat.
1) La méthodologie Natur’Adapt va être déployée à l’échelle de la Région Sud – Provence-Alpes-Côte d’Azur sur 13 réserves naturelles. Pourquoi avoir fait le choix de porter la démarche sur plusieurs sites en même temps ? Quel est votre rôle en tant que cheffe de projet ?
L’idée d’un projet commun a émergé lors de la restitution du projet LIFE[1] Natur’Adapt au congrès des Réserves Naturelles de France (RNF) en mai 2023, où plusieurs gestionnaires d’aires protégées de la région étaient présents. Un élan s’est rapidement manifesté pour mettre en œuvre cette méthode à court ou moyen terme sur leurs sites respectifs, générant une dynamique collective. Grâce au soutien de la DREAL PACA et de la Région Sud – Provence-Alpes-Côte d’Azur, le projet a pu voir le jour.
Avoir choisi de travailler simultanément sur plusieurs sites présente plusieurs avantages. Cela permet de mutualiser certaines tâches de gestion de projet souvent chronophages, ainsi que les temps de recherche bibliographique, d’analyse de données et de rédaction. De plus, nous pouvons mettre en commun les informations déjà recueillies par chacun, notamment sur des sites similaires. Enfin, pour les gestionnaires d’aires protégées, cette collaboration offre à mon sens un soutien précieux au cours de la démarche, montrant qu’ils ne sont pas seuls à affronter ces défis qui peuvent être anxiogènes, et qu’ils partagent la même envie d’y faire face.
En tant que cheffe de projet, mon rôle est de coordonner l’ensemble du projet à l’échelle régionale, après en avoir piloté le montage et la recherche de financement. Je m’assure de son bon déroulement, en accompagnant notamment les chargés de mission et en faisant le lien entre les différents acteurs : gestionnaires des sites et partenaires techniques et financiers. Je m’occupe également du déploiement de la méthode sur les trois réserves situées en Camargue : la Réserve naturelle nationale de Camargue, la Réserve naturelle nationale des Marais du Vigueirat et la Réserve naturelle régionale de la Tour du Valat.
2) Pendant la phase de test du projet Life Natur’Adapt, vous avez contribué à la mise en œuvre de la démarche sur le site de la Réserve naturelle nationale du Bagnas, situé sur le littoral méditerranéen en Occitanie. Quels sont vos retours d’expérience et vos impressions sur l’application de la méthode Natur’Adapt ?
Ce qui m’a paru intéressant, c’est qu’il y a eu autant, voire plus, de résultats immatériels que de rendus matériels. Au-delà des données collectées et des documents produits, la démarche a permis au gestionnaire de la réserve de prendre conscience de manière concrète des évolutions climatiques, de leur temporalité et de leurs impacts potentiels sur les milieux, la gestion et les activités du site. Elle a également favorisé une dynamique stimulante et initié des discussions approfondies, tant au sein de la réserve qu’avec plusieurs acteurs du territoire.
3) Selon vous, quelles sont les perspectives après la mise en place d’une telle démarche ?
La démarche Natur’Adapt est un processus d’adaptation continu face au changement climatique ; ce n’est pas un travail exhaustif ni figé. Il pourra être ajusté et enrichi en fonction des études et observations réalisées ultérieurement. Au-delà, on sait aujourd’hui que nous sommes engagés dans le phénomène de changement climatique pour des siècles : l’adaptation devra progressivement devenir un processus de routine pleinement intégré à la gestion de n’importe quelle aire protégée.
Un enjeu intéressant serait d’ouvrir, ultérieurement, la réflexion à une échelle plus globale que celle de chaque aire protégée, afin d’assurer une cohérence et une synergie avec les différents plans et politiques d’adaptation à l’œuvre sur le territoire.
On peut imaginer que notre expérience puisse servir d’exemple pour encourager d’autres gestionnaires à adopter cette approche. L’expérience acquise par la Tour du Valat sur ce projet pourrait également aider à soutenir d’autres partenaires gestionnaires dans l’ensemble du bassin méditerranéen. En Région Sud, d’autres sites hors réserves, tels que ceux gérés par le Conseil Départemental 13 (comme les espaces naturels sensibles) ou par les gestionnaires associés au Pôle-relais lagunes méditerranéennes, ont également montré un intérêt pour cette approche. À suivre…
Contact
Noémie Nojaroff, Cheffe de projet Natur’Adapt Sud
[1] LIFE : programme financier de la Commission européenne, dédié au soutien de projets innovants, privés ou publics, dans les domaines de l’environnement et du climat.