S’inspirant du concept de la Liste Rouge des espèces, l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a lancé en 2008 le concept d’une Liste Rouge des écosystèmes, qui a fait l’objet d’une résolution lors du dernier Congrès mondial de la nature à Jeju en Corée en septembre dernier.
Le cas des lagunes méditerranéennes présenté au congrès mondial de l’UICN
Si l’intérêt d’une telle approche est évidente pour la conservation, et notamment comme outil d’aide à la décision pour l’aménagement du territoire, il demeure que les écosystèmes sont des entités beaucoup plus complexes que les espèces et que l’élaboration d’une méthode standardisée applicable à toutes les échelles et pour tous les écosystèmes n’est pas une mince tâche. Cette méthode a été développée dans le cadre d’une consultation internationale au travers de plusieurs ateliers réalisés dans divers pays depuis 2010, dont l’un, qui avait pour principal thème les écosystèmes humides méditerranéens, s’est tenu à la Tour du Valat en septembre 2011.
5 critères pour évaluer le statut des écosystèmes
La démarche de l’UICN s’inspire de la définition même de l’écosystème proposée par Tansley en 1935, constitué de 4 élément-clés : une communauté d’espèces caractéristiques, un environnement physique, les processus et interactions entres les différents composantes, et l’étendue spatiale. Ainsi, cinq critères sont proposés pour évaluer le statut : la distribution géographique restreinte, le déclin dans la superficie (historique ou récent), la dégradation de l’environnement physique, les changements (perturbations) dans les interactions biotiques, et le risque d’effondrement de l’écosystème, lorsque celui-ci peut être modélisé. Le terme « effondrement » est donc préféré à celui d’extinction, car contrairement aux espèces, un écosystème peut perdre ses fonctionnalités tout en occupant le même espace.
Trois études de cas appliquant ces critères ont été présentées lors d’un atelier au dernier Congrès mondial de la nature, la première portant sur l’écosystème des lagunes méditerranéennes françaises. Celles-ci sont classées « vulnérables » suite à la dégradation de la qualité de leurs eaux, qui a pu être quantifiée grâce au réseau de suivi lagunaire de l’Ifremer. Leur évaluation a été réalisée avec celle d’autres écosystèmes humides français dans le cadre d’un stage Master en 2012 (rapport à télécharger ci-contre).
Évaluer tous les écosystèmes d’ici 2025
Les prochaines étapes sont le développement et la diffusion des outils expliquant la méthodologie, qui devraient être totalement opérationnels et disponibles dans les trois langues de l’UICN d’ici 2015, avec pour objectif à long terme que tous les écosystèmes soient évalués d’ici 2025. Le comité français de l’UICN participe activement à cette démarche et créera en début d’année 2013 un groupe d’experts au sein de sa commission Gestion des écosystèmes, pour promouvoir la mise en œuvre de cette initiative sur son territoire et développer de nouveaux cas d’études en se focalisant sur des écosystèmes forestiers et marins métropolitains et d’Outre-mer. Parallèlement, la Tour du Valat envisage de s’associer au bureau régional méditerranéen de l’UICN pour renforcer les capacités, et faciliter l’application des critères aux zones humides méditerranéennes
- Aurélien Carré, Programme « Gestion des écosystèmes », comité français de l’UICN – [email protected]
- Brigitte Poulin, département Écosystèmes,Tour du Valat – [email protected]