Dans deux lettres adressées aux ministres de la Transition écologique et de l’Agriculture, un collectif d’acteurs de l’environnement s’inquiète de l’impact de la mise en œuvre en France de la norme BCAE2 (Bonne Condition Agricole et Environnementale) « Protection des zones humides et des tourbières ».
La Tour du Valat est cosignataire de deux lettres interpellant les ministres de la Transition écologique et de l’Agriculture sur la décision ministérielle prise le 17 juillet dernier concernant les critères d’application de la BCAE2, une norme européenne conditionnant une partie des aides de la PAC (Politique agricole commune).
En effet, l’actuelle cartographie administrative envisagée limite son périmètre aux seuls sites RAMSAR et aux tourbières référencées au niveau national. Cette décision laisserait donc de côté de nombreux territoires et de très nombreuses zones humides, leur faisant courir un risque évident de drainage pour usage agricole. Cette décision mettrait à bas des décennies d’effort de préservation des zones humides, qui continuent à régresser malgré les plans nationaux dédiés à leur conservation.
Le collectif de têtes de réseaux d’aires protégées, en lien avec les grandes ONG de protection de l’environnement, appellent à une révision urgente de ces critères d’attribution afin d’inclure toutes les zones humides identifiées dans les inventaires du Réseau Partenarial des Données sur les Zones Humides (RPDZH). En effet, la préservation des zones humides est critique pour l’avenir de diverses activités humaines, et en particulier l’agriculture, face aux crises combinées du climat et de la biodiversité. C’est pourquoi il est nécessaire que cette BCAE2 s’applique à l’ensemble des zones humides inventoriées sur le territoire national.
Une autre nouvelle préoccupante pour l’avenir des zones humides avait déjà attiré notre attention cet été, avec la publication de l’arrêté du 3 juillet 2024 (modifiant celui du 9 juin 2021), qui simplifie les conditions de création de petits plans d’eau en zone humide. En effet, bien que la création de plans d’eau d’une superficie inférieure à un hectare en zone humide reste soumise à déclaration, elle n’est désormais plus soumise aux exigences de l’article 4 de l’arrêté du 9 juin 2021, à savoir :
« L’implantation d’un plan d’eau en zone humide ne peut intervenir que s’il participe à l’opération de restauration de la zone humide, ou dès lors que le projet de création du plan d’eau respecte les conditions suivantes :
- la création du plan d’eau répond à un intérêt général majeur ou les bénéfices escomptés du projet en matière de santé humaine, de maintien de la sécurité pour les personnes ou de développement durable l’emportent sur les bénéfices pour l’environnement et la société liés à la préservation des fonctions de la zone humide, modifiées, altérées ou détruites par le projet ;
- les objectifs bénéfiques poursuivis par le projet ne peuvent, pour des raisons de faisabilité technique ou de coûts disproportionnés, être atteints par d’autres moyens constituant une option environnementale sensiblement meilleure ;
- les mesures de réduction et de compensation de l’impact qui ne peut pas être évité, sont prises en visant la plus grande efficacité. »