Cette semaine, la Convention de Berne relative à la conservation de la vie sauvage en Europe a demandé la suspension de la construction d’un aéroport international dans l’aire protégée de la lagune de Vjosa-Narta en Albanie, une zone de halte essentielle pour des milliers d’oiseaux qui migrent chaque année entre l’Europe et l’Afrique. Cette décision fait écho aux alertes lancées par des experts et des scientifiques internationaux spécialisés dans la conservation de la nature, ainsi que par les institutions Européennes. L’Alliance Méditerranéenne pour les zones humides et ses partenaires ont adressé des lettres au Premier ministre Edi Rama, à la Commission européenne et à l’Association Internationale du Transport Aérien (IATA), appuyées par les signatures de 33 organisations représentant plus de 26 pays.
Dans une course contre la montre pour lancer le projet, le gouvernement albanais a contourné plusieurs procédures obligatoires, notamment l’obtention d’un permis de construire valide ou encore l’implication des communautés locales. Bien que les travaux de construction de l’aéroport international de Vlora aient déjà commencé en 2021, le permis n’a été accordé que cette année – 15 mois après le début des travaux.
Un an après le début des travaux, le gouvernement a retiré le site de l’aéroport du Paysage protégé de Vjosa-Narta, laissant une zone protégée avec un vide incohérent au centre. « La modification du périmètre de la zone protégée (…) n’est pas conforme à sa valeur en termes de biodiversité« , souligne la Convention de Berne relative à la conservation de la vie sauvage en Europe dans un rapport d’évaluation préparé conjointement avec la Convention sur les espèces migratrices (CMS) et l’Accord sur la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique-Eurasie (PNUE/AEWA). La Convention de Berne est allée plus loin et a demandé la suspension du projet jusqu’à ce qu’une étude d’impact sur l’environnement valable soit réalisée, qui devrait répondre aux normes techniques, scientifiques et méthodologiques internationales.
L’Alliance Méditerranéenne pour les zones humides, un réseau international de 30 organisations (dont la Tour du Valat) de 15 pays, ainsi que BirdLife, des membres de Wetlands International Europe et d’autres ONGEs demandent l’intervention urgente des autorités pour mettre fin à la destruction de ce joyau méditerranéen qui abrite plus de 70 espèces menacées, 200 espèces d’oiseaux et des espèces remarquables telles que la tortue caouanne (Caretta caretta), le phoque moine (Monachus monachus) ou des espèces endémiques comme la grenouille d’eau albanaise (Pelophylax shqipericus). Les lettres soulignent que les négociations d’adhésion de l’Albanie à l’UE devraient prendre en compte la préservation du patrimoine naturel et de la biodiversité irremplaçable.
« Le développement de l’aéroport n’est que la partie émergée de l’iceberg de l’urbanisation de masse de la région, ignorant non seulement la protection des extraordinaires trésors naturels, mais aussi l’amélioration des moyens de subsistance des communautés locales qui ne bénéficient que très peu de ce développement », a déclaré Emirjeta Adhami, de l’Institut pour la conservation de la nature en Albanie (INCA).
Des ONG locales, la Société ornithologique albanaise (AOS) et la Protection et la préservation de l’environnement naturel en Albanie (PPNEA), ont proposé plusieurs solutions alternatives à ce projet d’aéroport : l’extension de l’aéroport international de Tirana et/ou la connexion du sud du Pays avec une ligne ferroviaire à grande vitesse ou encore l’examen d’autres sites pour l’aéroport, tels que Risili, Kafaraj ou Levan, en fonction d’une étude d’impact environnementale appropriée.
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Alliance Méditerranéenne pour les zones humides