Le lundi 1er octobre à 11h, Sophie Grange (CEBC-CNRS) présentera à la Tour du Valat un séminaire intitulé “Le retour à l’état sauvage conduit-il à des réponses démographiques inhabituelles chez les grands mammifères ? Le cas des chevaux de Camargue.”
En partant d’une étude menée sur un troupeau de chevaux de race Camargue, qui furent relâchés dans la nature sans gestion humaine pendant plusieurs années (1974-81), nous proposons ici de tester l’effet d’une augmentation de la densité sur les taux démographiques de ces chevaux. Ce troupeau remis en liberté a en effet connu un fort accroissement en terme de densité, associé à une importante réduction des ressources alimentaires. A partir de données individuelles de survie et de fécondité, nous montrons ici que la survie des poulains est affectée par la densité. Comparativement aux petites pouliches, les poulains de moins d’un an semblent également plus dépendants de la condition corporelle des juments. La survie des étalons est très élevée et n’est pas affectée par la densité, ce qui est en accord avec les coûts remarquablement faibles associés aux combats entre mâles. A l’inverse, la survie des juments s’accompagne d’une sénescence et est fortement affectée par la densité, via la condition corporelle. La fécondité femelle n’est pas affectée par la densité, mais est fortement structurée en âge. La fécondité des jeunes juments est très variable, tandis que les juments matures maintiennent un fort taux de fécondité.
Nos résultats ne sont pas en accord avec les prédictions faites sur les ongulés sauvages, où une augmentation de densité devrait d’abord affecter la survie juvénile, puis la fécondité, et la survie des mâles devrait diminuer avant celle des femelles. Ces réponses inhabituelles sont liées à la domestication, conduisant à des étalons moins agressifs et des juments sélectionnées pour la reproduction. Notre étude montre en effet une différence de survie entre juments et étalons, associée à des coûts de reproduction élevés pour les femelles – en particulier pour les juments matures qui tentent de se reproduire chaque année coûte que coûte. La sélection humaine opérée à travers la domestication a donc conduit à des réponses démographiques différentes chez ces équidés.