Une récente étude de la Tour du Valat, menée en collaboration avec l’INRAE, modélise pour la première fois les interdépendances entre activités humaines et biodiversité de l’Île de Camargue.
Dans cette étude, publiée dans Ecology and Society[1], les chercheurs ont développé un modèle conceptuel dans lequel interagissent dynamique hydrosaline, gestion de l’eau, activités économiques (agriculture, chasse, pêche, tourisme) et milieux naturels.
Une approche méthodologique en quatre sous-modèles
Ce modèle conceptuel repose sur quatre sous-modèles qui fournissent des représentations complémentaires :
De la gouvernance de l’eau
De l’agriculture
Des communautés d’oiseaux
Des communautés de poissons
Ce modèle met en évidence les relations fortes et complexes entre les multiples entités du socio-écosystème deltaïque. Ces relations peuvent être de plusieurs natures :
Chaînes causales (succession d’impacts entre plusieurs entités) – 17 relations identifiées ;
Boucles de rétroaction (chaîne causale dans laquelle l’entité A influence une chaîne d’entités, qui influence alors A en retour pour amplifier ou amortir le processus) – 2 relations identifiées ;
Effets secondaires (lorsque la mise en œuvre d’actions visant à atteindre des objectifs spécifiques a un impact négatif ou positif inattendu sur d’autres entités) – 8 relations identifiées ;
Compromis (antagonisme entre deux processus concurrents, c’est-à-dire qu’une augmentation de l’un diminue l’autre) – 5 relations identifiées.
Principaux résultats et perspectives
L’étude met en évidence des boucles de rétroaction paradoxales : par exemple, le renforcement des réglementations sur les pesticides (notamment les herbicides du riz), destiné à protéger la biodiversité et améliorer la qualité de l’eau, a finalement conduit à une réduction des surfaces rizicoles1, diminuant alors la disponibilité des habitats pour les oiseaux d’eau au printemps.
Des arbitrages permanents
L’article met également en évidence l’arbitrage constant entre qualité et quantité d’eaudans la gestion du système lagunaire du Vaccarès, créant des compromis permanents entre les besoins des pêcheurs, les exigences écologiques et les contraintes agricoles.
Des enjeux sur la gouvernance sur l’eau en Camargue
L’étude souligne les limites actuelles dans la gouvernance de l’eau en Camargue. La Commission Exécutive de l’Eau (CEE), bien qu’informelle, ne couvre pas l’ensemble des enjeux interconnectés du système. L’étude souligne le besoin de repenser cet outil vers un forum plus global intégrant tous les acteurs et les multiples enjeux hydrologiques du territoire camarguais.
Ce modèle conceptuel constitue un point de départ pour développer une plateforme de modélisation quantitative et pourrait même être adapté à d’autres deltas méditerranéens.
1 Diminution de 50% des surfaces de riz depuis 1994 (de 24 000 à moins de 12 000 ha).
Référence de l’étude
Rodier R., Boutron O., Béchet A., Therond O. 2025. Interdependencies among hydro-saline dynamics, economic activities, ecological processes, and biodiversity in a deltaic social-ecological system: insights from the Rhône delta (southern France). Ecology and Society; 30. doi: 10.5751/ES-16122-300311[1]
Article publié dans le cadre de la thèse de Rose Rodier, co-écrit avec Olivier Boutron, Arnaud Béchet et Olivier Therond.
Flamingo, plateforme collaborative de crowdfunding dédiée aux zones humides vient de lancer sa première campagne « libellule cherche mare ! »
La première campagne intitulée « libellule cherche mare ! » soutient un projet porté par la Tour du Valat en faveur d’une libellule menacée
En France, près d’un tiers des libellules sont menacées. Le leste à grands stigmas (Lestes macrostigma), une libellule rare, voit ses chances de survie se réduire à mesure que disparaît son habitat naturel : les mares temporaires saumâtres. Pour cette espèce, la préservation de zones humides est vitale. Le projet mené sur la mare du Mas Neuf, au cœur de la Camargue, vise justement à refaire de cette mare une station de reproduction durable et tester une véritable « recette de cuisine » à reproduire à grande échelle.
Les différentes étapes prévues
Pour valider une méthode de restauration, il faut tester, observer, ajuster. Vous pouvez contribuer à cette étape décisive ! Voici un descriptif des différentes étapes du projet, si nous parvenons à obtenir les fonds nécessaires.
ACTE 1 (8500€) : Transplanter des bulbes de Scirpe maritime, la plante préférée de L. macrostigma, et suivre sa colonisation dans la mare.
ACTE 2 (8400€) : Introduire des œufs de L. macrostigma en suivant une technique qui a fait ses preuves en 2020, puis étudier la colonisation par cette libellule, et notamment son utilisation des scirpes lors de la ponte.
ACTE 3 (6200€) : Réitérer l’expérience pilote dans de nouvelles mares en PACA et en Occitanie avec suivi de l’activité de ponte dans les scirpes par les femelles
ACTE 4 (4200€) : Diffuser la méthode à grande échelle !
En bref
Pour valider une méthode, il faut tester, observer, ajuster : le crowdfunding peut permettre à ce projet de restauration de franchir cette étape décisive.
C’est grâce à votre soutien que le projet pourra faire ses preuves — et prétendre à des financements européens plus ambitieux, comme le programme européen LIFE !
🙏 Même un petit don compte (et pour rappel il est déductible à 66 % et pour chaque don il y a un petit cadeau).
🎁 Plusieurs contreparties pour vous remercier de votre engagement : livres, coffrets, affiche artistique, rencontres avec les chercheurs, visites guidées, week-end en Camargue…
N’hésitez pas également à faire circuler l’info, à en faire la promotion auprès de vos amis et à contribuer à ce un beau projet !
Les flamants roses nous révèlent leur secret sur le vieillissement
Vieillir est-il une fatalité ? Si la plupart des êtres vivants vieillissent, certains le font plus lentement que d’autres. Unenouvelleétudescientifiquepubliée ce jour dans ProceedingsoftheNational Academy of Science (PNAS) [3]aborde une question fascinante : et si le fait de migrer influençait la manière dont on vieillit ? Pour explorer ce mystère,les scientifiques se sont intéressés au flamant rose (Phoenicopterus roseus), cet oiseau migrateurgracieuxetemblématiquede la Camargue.
Desoiseauxquinevieillissentpastous de la même façon
Grâce à un programme de baguage et de suivi des flamants roses mené pendant plus de 40 ans par l’institut de recherche de la Tour du Valat, les chercheurs ont découvert un phénomène étonnant : les flamants migrateurs vieillissent pluslentementquelesrésidents. Chez cette espèce en effet, certains oiseaux restent toute leur vie en Camargue (on les appelle les« résidents »),tandisqued’autresparcourent chaque année les rives de la Méditerranée (ce sont les « migrateurs »).
Au début de leur vie adulte, les flamants résidents s’en sortent mieux : bien installés dans les lagunes des côtes méditerranéennes françaises pendant l’hiver, ils survivent et se reproduisent davantage que les migrateurs.
Mais à quel prix ? En prenant de l’âge, les résidents déclinent plus rapidement. Avec un vieillissement40 %plusimportant,leur capacité à se reproduire diminue et le risque de passer devieàtrépasaugmenteplusvitequechezles flamantsmigrateurs.Aucontraire,lesflamants migrateurs,ceuxquipartenthivernerenItalie, enEspagneouenAfriqueduNord,payentcher le coût de ces voyages saisonniers en début de vie (plus forte mortalité et reproduction moindre) mais semblent le compenser par un vieillissement ralenti à un âge avancé. Ainsi, le début du processus de vieillissement intervient de manière plus précoce chez les résidents (20,4 ans en moyenne) que chez les migrateurs (21,9 ans).
Lamigration:uncomportementanimal qui influence le vieillissement
Cetteétudemontrequelamigrationsaisonnière –uncomportementmassivementutilisépardes milliardsd’animaux–peutinfluencerlerythme du vieillissement. Chez les flamants, décider de ne pas migrer offre des avantages en début de vie qui sont associés à une sénescence accélérée à un âge avancé.
« Ceci est probablement lié à un compromis entreperformancejeuneetsantéàun âge avancé », explique Sébastien Roques, chercheurauCNRSetco-auteurdel’étude.
«Lesrésidentsviventintensémentaudébut, mais paient ce rythme plus tard. Les migrateurs, eux,semblentvieillirpluslentement».
Avecleurlongueduréedevie(certainsdépassent 50ans!)etleurdiversitécomportementale,les flamants roses constituent plus qu’un animal emblématique de la Camargue.
Ils offrent aussi un modèle idéal pour comprendrelevieillissementchezlesanimaux. « C’est tout l’intérêt d’avoir poursuivi cette étude àlongterme.Initiéeen1977enCamargueparle marquage des flamants avec des bagues lisibles àdistanceavecuntélescope,ceprogramme permet aujourd’hui encore d’observer des flamantsbaguéscetteannée-là»précisent ArnaudBéchet et Jocelyn Champagnon, Directeurs de recherche à la Tour du Valat et co-auteursdel’étude.«C’estunjeudedonnées uniqueensongenrequis’avèreprécieuxpour comprendrelesressortsduvieillissementdans lespopulationsanimales».
Percerlessecretsduvieillissement,une quête scientifique et existentielle
Cette découverte s’inscrit dans un domaine de recherche passionnant : la sénescence, c’est-à-dire le vieillissement biologique.
Hugo Cayuela, un des co-auteurs de l’étude, chercheuràl’Universitéd’Oxford,commente: « Comprendre les causes des changements devitesse de vieillissement est un problème quiobsèdeleschercheursetlesphilosophes polymathesdepuisl’Antiquité».Etdecontinuer «Pendant longtemps, nous avons pensé que cesvariationss’opéraientessentiellemententre espèces. Mais récemment, notre perception duproblèmeachangé.Nousaccumulonsdes preuvesmontrantque,auseind’unemême espèce, les individus ne vieillissent souvent pas au même rythme du fait de variations génétiques, comportementales, et environnementales».
En étudiant comment certains animaux naissent, se reproduisent et meurent, les scientifiques espèrent percer les secrets du vieillissement… Tentant ainsi d’apporter des réponses à l’une des questionslesplusexistentiellesetcentralesen biologie : pourquoi et comment mourrons-nous ?
Référence de l’étude
H. Cayuela, S. Roques, A. Arnaud, C. Germain, A. Béchet, & J. Champagnon, Migration shapes senescence in a long-lived bird, Proc. Natl. Acad. Sci. U.S.A. 122 (36) e2422882122, https://doi.org/10.1073/pnas.2422882122[4] (2025).
Le MOOC-RESSOURCE propose 6 modules (environ 40 heures de formation) avec un contenu pédagogique exceptionnel : plus de 5 000 photographies d’oiseaux, 219 fiches d’identification d’espèces, 40 séquences pédagogiques et 23 entretiens vidéo avec des experts. La formation couvre l’identification des espèces, les techniques de dénombrement et le contexte de la conservation des zones humides dans la moitié nord de l’Afrique.
Modalités pratiques
L’accompagnement pédagogique s’étend du 15 septembre au 24 octobre 2025, avec un accès au contenu jusqu’au 18 décembre 2025. Cette flexibilité permet de suivre la formation à son rythme sur trois mois.
Développé par le projet RESSOURCE en collaboration avec la Tour du Valat et l’Office français de la biodiversité, ce projet bénéficie du soutien du FFEM et de l’Union européenne. L’objectif : créer un réseau d’observateurs qualifiés pour la conservation des zones humides.
Un enjeu de conservation majeur
Les zones humides d’Afrique du Nord et du Sahel accueillent des millions d’oiseaux d’eau, qu’ils soient migrateurs ou résidents permanents. Ces espèces jouent un rôle essentiel dans les écosystèmes locaux et contribuent directement à la sécurité alimentaire et financière de nombreuses communautés de la région. Face aux pressions croissantes sur ces milieux fragiles, le développement de réseaux d’observateurs qualifiés devient une priorité pour leur conservation.
Un état des lieux stratégique dans un contexte de tensions croissantes
Depuis plus d’une décennie, l’Observatoire des Zones Humides Méditerranéennes (OZHM)[6] accompagne les politiques publiques et les actions de conservation en produisant des évaluations régionales fondées sur des données scientifiques robustes. Après une première édition en 2012 qui a posé les bases d’un suivi partagé à l’échelle du bassin, suivi d’une deuxième publication en 2018 consacrée à l’actualisation des connaissances et à l’exploration de solutions durables, cette troisième édition “Zones humides méditerranéennes : Des Réponses face aux Crises”[7], constitue une nouvelle étape majeure. Publié à l’occasion de la COP15 Ramsar (Victoria Falls, Zimbabwe, 23-31 juillet 2025), le rapport dresse un état des lieux actualisé, dans un contexte de pressions environnementales, sociales et climatiques qui ne cessent de s’intensifier.
[7]
Le MWO-3 s’appuie sur une analyse structurée fondée sur 18 indicateurs DPSIR (Drivers – Pressures – State – Impacts – Responses), élaborés par l’OZHM en étroite collaboration avec un large réseau de partenaires scientifiques et techniques issus des 28 pays membres de l’Initiative Régionale Ramsar MedWet et au-delà. Ce dispositif permet d’analyser les dynamiques à l’œuvre : des facteurs de changement comme la démographie ou le climat, aux pressions exercées sur les zones humides (artificialisation, pollutions, prélèvements d’eau), en passant par l’évaluation de leur état écologique, des impacts observés sur la biodiversité et les services écosystémiques rendus, jusqu’aux réponses mises en place aux différentes échelles.
L’analyse met en évidence une dégradation continue : réduction de la surface et de la qualité des habitats humides, perte de connectivité hydrologique, tensions accrues sur l’eau et vulnérabilités croissantes face aux aléas climatiques. Mais au-delà du diagnostic, le rapport éclaire aussi les réponses existantes et les marges de progrès. Il identifie des leviers d’action concrets pour restaurer les fonctions écologiques, renforcer la résilience des milieux et valoriser durablement les services rendus aux sociétés méditerranéennes.
Structuré en trois volets complémentaires, le rapport comprend :
Une synthèse technique qui présente les tendances observées, les enseignements issus de l’analyse des 18 indicateurs DPSIR, ainsi que les principaux moteurs de changement à l’échelle du bassin ;
Des recommandations articulées autour de cinq leviers d’action, offrant des orientations stratégiques aux décideurs politiques, gestionnaires et acteurs de terrain, afin de mobiliser des efforts concrets pour concilier développement et préservation des zones humides ;
Une série de fiches-indicateurs détaillées, qui présentent les résultats de manière structurée et en proposent une interprétation synthétique
En complément, plusieurs études de cas issues de contextes locaux variés viennent illustrer les processus à l’œuvre et les réponses engagées sur le terrain. Enfin, des infographies et des cartes synthétiques facilitent la lecture et renforcent l’accessibilité des résultats à un public large.
Le MWO-3 s’adresse à l’ensemble des parties prenantes concernées par l’avenir des zones humides méditerranéennes : autorités nationales, collectivités territoriales, agences de bassin, organisations de la société civile, scientifiques, usagers et communautés locales. Il vise à alimenter les débats, à renforcer la cohérence des politiques publiques et à inspirer des actions coordonnées et ambitieuses, à la hauteur des enjeux.
Dans une Méditerranée soumise à des tensions multiples, le message porté par l’OZHM est clair : préserver les zones humides, ce n’est pas freiner le développement, c’est le rendre possible, intégré et durable.
La Tour du Valat, dans le cadre du Centre de ressources milieux humides porté par l’Office français de la biodiversité (OFB), et en partenariat avec le Ministère de la Transition écologique, de la Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche, vous invite au :
FORUM NATIONAL RECHERCHE-GESTION MILIEUX HUMIDES
du 19 au 21 novembre à Arles
Créer plus de synergies entre les infrastructures de recherche françaises et les gestionnaires, voilà l’objectif de ce Forum recherche-gestion sur les milieux humides.
Il y a urgence à mieux travailler ensemble : Alors que les crises combinées du climat et de la biodiversité affectent très fortement les milieux humides, la question de la collaboration entre chercheurs, gestionnaires mais aussi représentants institutionnels et bailleurs de fond se pose de façon plus aigüe que jamais.
Ce forum sera accueilli par LUMA Arles. Découvrez[10] le lieu unique où nous allons renforcer les liens entre science et gestion.
Vous pouvez dès maintenant consulter[11] la liste des hébergements arlésiens disponibles en novembre.
En 2025, la ville d’Arles se voit décerner le label « Ville des zones humides Ramsar« par la Convention de Ramsar. Cette distinction met en lumière « des efforts exceptionnels de sauvegarde des zones humides urbaines en faveur des populations et de la nature« .
74 villes sont ainsi accréditées dans 27 pays.
Plus de 400 jeunes goélands railleurs bagués sur les salins d’Hyères
Organisé annuellement en collaboration avec la LPO Paca, le baguage des poussins de goélands railleurs permet le suivi de cette espèce rare et menacée en France.
Fin juin, 403 poussins de goélands railleurs (Larus genei) ont été bagués sur les Salins d’Hyères. Propriété du Conservatoire du Littoral et géré par Toulon Métropole, ce site accueille l’une des rares colonies de reproduction de goélands railleurs en France. L’opération a été réalisée en partenariat avec la LPO Paca, en charge des suivis ornithologiques sur le site.
Inféodé aux zones humides saumâtres, le Goéland railleur est considéré comme « en danger » en France, où environ 800 couples sont répartis notamment en Camargue, dans l’Aude, l’Hérault ou le Var. L’espèce est principalement menacée par la disparition de ses habitats de nidification et par la concurrence avec d’autres espèces de mouettes ou de goélands. Cependant, et grâce à l’implantation d’îlots favorables à sa nidification en Méditerranée, ses effectifs sont en augmentation en Europe depuis plusieurs années.
La Tour du Valat réalise régulièrement des opérations de suivi de cette espèce depuis 1997. Le baguage des poussins permettra de les suivre, une fois leur envol pris, dans leurs déplacements tout autour du bassin méditerranéen. «
Le goéland railleur
Plus petits et élancés que les « gabians », les goélands railleurs se reconnaissent à leurs pattes rouge carmin, leurs dos et ailes grises aux extrémités noires, ainsi que par le blanc immaculé du reste de leur corps (contrairement aux mouettes rieuses dont la tête se pare d’un capuchon marron foncé en été, et de taches sombres en hiver).
Oiseau migrateur et nicheur annuel, le goéland railleur peut s’observer dès le mois de mars sur les salins d’Hyères, où a eu lieu l’opération de baguage, grâce aux sorties natures organisées par la LPO Paca.
André Hoffmann, Président de la Tour du Valat a été honoré par le gouvernement mauritanien pour son action en faveur de la conservation du Parc National du Banc d’Arguin.
Remise de la médaille de chevalier dans l’ordre national du mérite de la Mauritanie
André Hoffmann a reçu, conjointement avec Theunis Piersma, la médaille de chevalier dans l’ordre national du mérite de la Mauritanie pour leur action en faveur du Parc National du Banc d’Arguin[12].
Créé en 1976 et inscrit au patrimoine mondial de l’Humanité en 1989, le PNBA est une des plus vastes aires marines protégées d’Afrique. Il couvre près d’un tiers du littoral de la Mauritanie avec une superficie de 12 000 km2, dont 5 400 marins. Ce site abrite de nombreuses espèces de poissons et crustacés et accueille plus de deux millions d’oiseaux migrateurs dont le fameux bécasseau maubèche (Red Knot), beaucoup étudié par Theunis. Il est un refuge pour des espèces menacées emblématiques comme le dauphin à bosse, les tortues marines ou la gazelle Dorca. Ses hauts fonds, vasières et herbiers marins, lui confèrent une valeur écologique unique, abritant notamment l’un des plus vastes réservoirs de carbone bleu au monde. Le parc est aussi le territoire des pêcheurs traditionnels Imraguen et leurs lanches à voile sont les seules embarcations autorisées à pêcher dans les limites du parc.
« Comment est-ce qu’on peut protéger le Banc d’Arguin pour l’humanité et pas seulement pour le privilège de quelques ornithologues ? Tout part de là. La meilleure manière de protéger la zone c’est les Imraguen, ce sont les humains, les pêcheurs du désert. Développer l’économie locale, avec la pêche pour continuer à protéger la zone. […] Aller en Mauritanie c’est ne plus revenir pareil, c’est revenir changé : un moment très important pour moi. Mon père a initié quelque chose d’humble et de courageux que j’ai poursuivi, avec d’autres, debout sur les épaules d’un géant », a exprimé André Hoffmann.
En 1982, Luc Hoffmann avait été marqué par la beauté et la biodiversité du Banc d’Arguin. En 1986, il contribue, avec le gouvernement mauritanien, à la création de la Fondation Internationale du Banc d’Arguin ; puis, en 2009, au premier fonds fiduciaire pour la conservation en Afrique de l’Ouest. Des liens naturels et forts entre le PNBA et la Tour du Valat ont ainsi vu le jour.
Parc National du Banc d’Arguin
La visite de la délégation mauritanienne en Camargue a été l’occasion d’échanges fertiles entre les équipes et a mis en lumière la volonté commune de renforcer les collaborations et les ponts entre les dynamiques de conservation en Méditerranée et en Afrique de l’Ouest : « des liens qui ont du sens » pour André Hoffmann.
Nos félicitations à André et Theunis Piersma pour tout le travail accompli en faveur de ce site exceptionnel et merci à la délégation mauritanienne pour cette reconnaissance et ce temps d’échange tout à la fois fertile et plein d’humanité.
En présence de :
Monsieur Nami Salihy, Directeur du parc national du banc d’Arguin
Monsieur Sidina, Directeur adjoint du banc d’Arguin
Monsieur Ahmed Lefghih, Directeur exécutif du bacomab
Monsieur Ahmed Senhoury, Directeur exécutif de Partenariat Régional pour la conservation de la zone côtière et marine en Afrique de l’Ouest PRCM
Mise en ligne de la Base de connaissance eau et biodiversité
Un nouvel outil en ligne regroupe les bases de connaissance sur l’eau et la biodiversité de 27 partenaires de différentes instances publiques françaises œuvrant dans ces domaines.
[13]
Fruit de plusieurs mois de réflexions et de développement, cette base de connaissance[13] permet de rechercher une information fiable, qualitative, sélectionnée par des spécialistes de la gestion de l’information et des connaissances dans les thématiques de l’eau et de la biodiversité. Dotée d’un agent conversationnel expérimental, elle s’adresse à tout type de publics et propose des services assistés par intelligence artificielle (résumé et questionnement en langage naturel).
L’objectif est de proposer un accès facile et gratuit à l’intégralité des documents scientifiques et techniques produits par les instances publiques (comme les agences de l’eau, l’Office Français de la Biodiversité, les pôles relais zones humides, des organismes de recherche, etc.) sur les thématiques de l’eau, des milieux aquatiques et de la biodiversité. On peut y retrouver des actualités, articles de revues scientifiques, documentations techniques, études, comptes rendus de projets de recherche, métadonnées, notices d’ouvrages, …
Ce projet est développé avec le soutien financier de l’Office français de la biodiversité et s’appuie sur le réseau de compétences documentaires. Les développements informatiques sont assurés par l’Office International de l’Eau.
Les mesures de conservation les plus à même d’aider les communautés d’oiseaux d’eau à s’adapter au changement climatique sont celles qui ciblent directement la conservation des zones humides, selon une étude récemment publiée dans la revue Biological Conservation[15].
Face au réchauffement climatique, les communautés d’oiseaux d’eau répondent aux modifications de leur environnement. La stratégie principale qui a pu être observée chez ces espèces est de déplacer leur aire de distribution vers des régions plus froides, soit en remontant vers les pôles, soit en gagnant en altitude.
Ce déplacement est particulièrement visible chez les oiseaux d’eau migrateurs, dont la grande mobilité leur permet de modifier rapidement leurs zones d’hivernages lorsque la température change. C’est par exemple le cas des grues cendrées qui, plutôt que de descendre en Espagne ou de traverser la mer Méditerranée, sont de plus en plus nombreuses à hiverner en Camargue.
Cependant, bien que les oiseaux d’eau modifient leur répartition géographique, cette adaptation reste trop lente face au changement climatique. Ce décalage croissant crée une « dette climatique » pour les espèces, dont les environnements correspondent de moins en moins à leurs besoins biologiques.
L’adaptation au changement climatique représente un défi crucial pour les scientifiques et les gestionnaires d’espaces naturels qui doivent développer de nouvelles approches de conservation. Souvent appelées « stratégies d’adaptation au changement climatique pour la biodiversité », ces approches deviendront essentielles dans les années à venir.
Protéger les habitats pour mieux protéger les espèces
Cette étude a évalué comment la gestion des sites Natura 2000 menée dans le cadre des projets LIFE a aidé les communautés d’oiseaux d’eau à s’adapter au réchauffement climatique. Elle s’est appuyée sur des données provenant de 26 pays de l’UE et sur plus de 2 300 sites situés dans des sites Natura 2000 bénéficiant d’un financement LIFE.
Il en ressort que les mesures de conservation qui aidaient le plus à l’adaptation des oiseaux d’eau étaient les mesures ciblant directement la conservation des zones humides. En effet, elles permettent une adaptation deux fois plus rapide que d’autres mesures de conservation ciblant directement les oiseaux d’eau, d’autres espèces ou des habitats autres que les zones humides.
« Les résultats sont encourageants car ils suggèrent également que, bien que la grande majorité des projets LIFE n’aient pas ciblé explicitement le changement climatique, ils ont permis aux espèces de s’adapter au réchauffement. », note Elie Gaget[16], chargé de recherche en écologie statistique à la Tour du Valat et co-auteur de l’article.
Des études antérieures nous ont appris que les zones protégées, et en particulier celles qui disposent d’un plan de gestion, contribuent le plus à l’adaptation des communautés d’oiseaux d’eau au réchauffement climatique, tandis que la destruction des lhabitats naturels est néfaste à l’adaptation. A présent, cette étude démontre que la conservation des habitats des oiseaux d’eau est un paramètre clé pour leur adaptation au réchauffement climatique.
Référence de l’étude
Leonie Jonas, Jon E. Brommer, Martin Jung, Michal Baláž, John J. Borg, Luka Božič, Preben Clausen, Antoine Derouaux, Koen Devos, Cristian Domșa, Sándor Faragó, Niamh Fitzgerald, Valeri Georgiev, Fredrik Haas, Menno Hornman, Christina Ieronymidou, Tom Langendoen, Aleksi S. Lehikoinen, Kim Lindner, Leho Luigujõe, Włodzimierz Meissner, Tibor Mikuska, Blas Molina, Filipe Moniz, Zuzana Musilová, Danae Portolou, Gwenaël Quaintenne, Juhani Rantanen, Laimonas Šniaukšta, Antra Stīpniece, Norbert Teufelbauer, Marco Zenatello, Elie Gaget
Interactions between climate warming and management actions determining bird community change in protected areas,
Biological Conservation, Volume 308, 2025, 111213, ISSN 0006-3207, https://doi.org/10.1016/j.biocon.2025.111213[17].
Zones humides, satellite et conservation : les avancées de la cartographie des habitats des ZH en France partagées au Living Planet Symposium 2025
Le mardi 24 juin à Vienne, dans le cadre du Living Planet Symposium organisé par l’Agence Spatiale Européenne (ESA), les premiers résultats de la phase 2 du projet de cartographie nationale des habitats des milieux humides en France ont été présentés. Ce projet, financé par le Ministère de la Transition Écologique et de la Cohésion des Territoires, est piloté par PatriNat[18], Université de Rennes-2 et la Tour du Valat.
Nina Bègue lors de la session “Wetlands: from Inventory to Conservation”
Lors de la session “Wetlands: from Inventory to Conservation”, animée par Lammert Hilarides (Wetlands International[19]) et Dania Abdul Malak (European Topic Centre – Université de Malaga[20]), en présence de Marc Paganini (Agence Spatiale Européenne[21]), Nina Bègue, ingénieure en télédétection à la Tour du Valat et membre de l’Observatoire des Zones Humides Méditerranéennes[22], a exposé la méthodologie mise en œuvre et les résultats obtenus. Elle a notamment mis en lumière l’utilisation inédite de la typologie EUNIS, pour cartographier les habitats en milieux humides à partir de données d’observation de la Terre.
Les retours ont été nombreux, avec un intérêt marqué pour les potentialités de la télédétection dans le suivi de la biodiversité des zones humides via l’utilisation de la typologie EUNIS, ainsi que pour les perspectives de généralisation à d’autres contextes.
Cette participation a permis de renforcer les échanges avec la communauté scientifique de l’observation de la Terre, de recevoir des retours critiques sur la méthodologie utilisée, d’identifier de nouvelles pistes de collaboration scientifique et d’assurer une veille sur les outils et méthodes d’inventaire écologique.
À l’approche de la COP Ramsar, ces travaux viennent nourrir l’expertise de l’Observatoire des Zones Humides Méditerranéennes[22]. Ils alimenteront notamment le futur Géoportail des zones humides méditerranéennes, outil clé de diffusion et de sensibilisation pour la préservation de ces écosystèmes essentiels.
Présentateurs, animateurs et partenaires de la session “Wetlands: from Inventory to Conservation”
Lors du Living Planet Symposium, l’Agence Spatiale Européenne[21] et la Convention de Ramsar sur les zones humides[23], représentée par sa Secrétaire Générale Dr. Musonda Mumba, ont signé un Mémorandum d’entente visant à mettre à profit les technologies d’observation de la Terre afin d’appuyer la conservation des zones humides.
Cet accord porte sur la surveillance des sites Ramsar, l’identification de zones prioritaires de restauration, le développement des inventaires nationaux des zones humides, l’intégration de données satellitaires et terrestres et l’appui à l’initiative GEO Wetlands.[24]
A l’occasion de l’édition 2025 du Festival de la Camargue et du Delta du Rhône, trois sorties pour partir à la découverte des zones humides ont été proposées par la Tour du Valat. La Fondation a également participé à une table ronde sur le thème de la chasse, à retrouver en podcast à la fin de cet article.
Visite de la Réserve Naturelle Régionale de la Tour du Valat
Au matin du 28 mai, un premier groupe est parti à la découverte de la Réserve Naturelle Régionale de la Tour du Valat. Marion Lourenço, éco-garde à la Tour du Valat, a accompagnés les participant·es au sein des différents milieux qui coexistent sur ce site d’exception, à travers les sansouïres, les mares temporaires et les montilles, jusqu’à arriver au marais du St-Seren.
Entre observations naturalistes et découverte des zones humides, cette visite fut également l’occasion d’évoquer les différentes modalités de gestion de cet espace patrimonial d’exception.
Suivi participatif des chauves-souris au crépuscule
Proposée dans le cadre des actions de sciences participatives du projet Rest-Chir’Eau, cette sortie a permis à 20 participant·es de prendre part à un protocole scientifique visant à évaluer l’activité des chauves-souris le long d’un ancien bras alluvial du Rhône.
Après une présentation des liens étroits qui relient les chauves-souris aux zones humides, le groupe s’est réparti à différent points stratégiques afin de dénombrer les chauves-souris à la tombée du jour. A la fin du protocole, Pauline Rocarpin, coordinatrice du projet, a proposé un moment d’écoute et d’observation des chiroptères pour clôturer la soirée.
Visite des marais de Raphèle : découverte d’une tourbière méditerranéenne
Accompagnés de Grégoire Massez, conservateur du site des marais de Raphèle, d’Antoine Gazaix, spécialiste de la tourbe, ainsi que d’un salarié du SYMCRAU, les participants ont pu visiter une partie de cette tourbière habituellement fermée au public et qui abrite de nombreuses espèces de plantes rares et menacées.
Au fil des canaux, ce parcours de 6 kilomètres les a menés à la rencontre de cette zone humide méconnue, son histoire, son fonctionnement et ses richesses naturelles.
Plateau radio : “Comment concilier chasse et biodiversité”
En Camargue, la chasse tient une place singulière dans la gestion des milieux naturels. C’est pourquoi, à l’occasion de la révision de sa charte, le Parc de Camargue à convié le public du festival, ainsi que plusieurs acteurs locaux, à échanger autour du thème de la chasse et la biodiversité à l’heure du changement climatique.