Depuis 2006, la Tour du Valat est associée à l’expérimentation de démoustication de l’embouchure du Grand Rhône lancée par le Département des Bouches du Rhône. Après presque 20 ans d’expérimentation, et face au constat de l’impact de la démoustication au Bti sur la faune sauvage non-cible, plusieurs alternatives ont été développées.

Expérimentation de la démoustication au BTI
Depuis août 2006, une démoustication expérimentale par épandage de Bti est mise en œuvre sur la partie sud-est de la Camargue. A la demande du Parc naturel régional de Camargue, des études d’impact ont été mises en place par la Tour du Valat, notamment pour étudier l’impact de l’insecticide sur la faune sauvage non-cible.
Le Bti est un insecticide composé de spores de la bactérie Bacillus thuringiensis. Ingérée par les larves aquatiques de moustiques, elle sécrète des toxines qui
entraînent la mort de l’animal. Découvert en 1976, il est largement utilisé dans le monde, notamment en France, où il est épandu sur les zones humides à la main, par pulvérisateur ou par voie aérienne.
Comme cet insecticide non chimique est peu susceptible d’affecter directement la faune non-cible, les études proposées par la Tour du Valat ont porté sur les impacts indirects, à travers la chaîne alimentaire : comment les prédateurs des moustiques et chironomes (petits diptères non-piqueurs également sensibles au Bti) sont-ils affectés par la diminution de leurs proies ?
Un impact non-négligeable sur la faune non-cible
Les études ont révélé des impacts sur la faune non-cible supérieurs à ceux généralement observés avec des insecticides chimiques (Poulin 2012) :
- la mortalité d’un tiers des oisillons d’hirondelle a été constatée, à la suite de la modification de leur régime alimentaire (Poulin et al. 2010) ;
- l’abondance et la diversité des libellules a subi une baisse de 50 % (Jakob et Poulin 2016)
- l’abondance des invertébrés des roselières servant de nourriture aux passereaux paludicoles diminue également de 34 % (Poulin et Lefebvre 2016).
L’accumulation et la prolifération des spores de Bti dans les sédiments suggèrent par ailleurs des impacts sur les chironomes benthiques bien au-delà des périodes d’épandage.

A la recherche de solutions alternatives
Depuis la publication de ces résultats, des études se sont orientées vers la recherche de solutions alternatives au Bti qui puissent être compétitives en matière de résultat, mais également de prix.
Parmi les solutions développées, des pièges anti-moustique permettent de contrôler les zones habitées en piégeant les moustiques à l’aide de CO2. En Camargue, la société Techno BAM a développé les bornes Qista, des bornes anti-moustiques sur ce principe, en partenariat avec le Parc de Camargue et la Tour du Valat. Une expérimentation grandeur nature menée durant deux ans (2015-2017) au hameau du Sambuc a montré que l’on pouvait réduire de 70 % la nuisance causée par les moustiques grâce à l’installation de pièges à moustiques, sans impact environnemental et à moindre coût (Poulin et al. 2017). Contrôle des eaux stagnantes, stérilisation des mâles et prévention des populations sont autant de dispositifs alternatifs et sans impact sur la biodiversité. Plutôt que de traiter des milliers d’hectares de milieux naturels, ces solutions se concentrent sur la protection des zones habitées, pour réduire les nuisances en impactant au minimum la biodiversité.
Revue de presse– Les Echos « Moustiques : quand la tech remplace les insecticides » [1] – Le Figaro « Pièges à CO2, stérilisation des mâles, contrôles des eaux : la lutte contre les moustiques passe par une combinaison de dispositifs [2] » – L’Echo du Mardi « Démoustication de la Camargue : quel bilan depuis son lancement en 2006 ? [3]» – France 3 PACA « Une technique de démoustication pour réduire les nuisances tout en préservant l’environnement [2] » |